À mon ami Ludovic Chênard
Loin des champs où les écoliersSautent, sans pions et sans colliers,Oubliant collège ou pension,Dans les maisons de correctionIl est des pauvr’s petits enfantsQui sont enfermés tout le temps.Ils voudraient bien, en liberté,Vivre aussi les beaux jours d’été.Mais, hélas ! leur triste horizonC’est le mur noir de la prison.Il est des pauvr’s petits enfantsQui sont enfermés tout le temps.Ils voudraient inventer des jeuxEt courir dans les chemins creux ;Mais, hélas ! leurs bois, leurs halliers,C’est le mur blanc des ateliers.Il est des pauvr’s petits enfantsQui sont enfermés tout le temps.Ils voudraient bien en s’endormant,Redire aussi : « Bonsoir, maman ! »Mais, hélas ! leurs sombres parentsC’est l’œil soupçonneux des tyrans.Il est des pauvr’s petits enfantsQui sont enfermés tout le temps.Ils voudraient bien aussi, chez eux,Rêver dans de bons lits moelleux.Mais, hélas ! leur bon lit bien chaudC’est la paillasse et le cachot.Il est de pauvr’s petits enfantsQui sont enfermés tout le temps.Collégiens, qui vous en allezCueillir les bleuets dans les blés,Quand les feux du soleil couchant,Le soir, viendront rougir le champ,Pensez aux pauvr’s petits enfantsQui sont enfermés tout le temps.
4 aout 1887