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Les Sans-vacances

Jouy, Jules


Texte de Jules Jouy (1887). Sur l’air « La Légende de Saint-Nicolas », traditionnel.


À mon ami Ludovic Chênard

Loin des champs où les écoliers
Sautent, sans pions et sans colliers,
Oubliant collège ou pension,
Dans les maisons de correction
Il est des pauvr’s petits enfants
Qui sont enfermés tout le temps.
 
Ils voudraient bien, en liberté,
Vivre aussi les beaux jours d’été.
Mais, hélas ! leur triste horizon
C’est le mur noir de la prison.
Il est des pauvr’s petits enfants
Qui sont enfermés tout le temps.
 
Ils voudraient inventer des jeux
Et courir dans les chemins creux ;
Mais, hélas ! leurs bois, leurs halliers,
C’est le mur blanc des ateliers.
Il est des pauvr’s petits enfants
Qui sont enfermés tout le temps.
 
Ils voudraient bien en s’endormant,
Redire aussi : « Bonsoir, maman ! »
Mais, hélas ! leurs sombres parents
C’est l’œil soupçonneux des tyrans.
Il est des pauvr’s petits enfants
Qui sont enfermés tout le temps.
 
Ils voudraient bien aussi, chez eux,
Rêver dans de bons lits moelleux.
Mais, hélas ! leur bon lit bien chaud
C’est la paillasse et le cachot.
Il est de pauvr’s petits enfants
Qui sont enfermés tout le temps.
 
Collégiens, qui vous en allez
Cueillir les bleuets dans les blés,
Quand les feux du soleil couchant,
Le soir, viendront rougir le champ,
Pensez aux pauvr’s petits enfants
Qui sont enfermés tout le temps.

4 aout 1887


Paru dans : Jouy, Jules. Les Chansons de l’année [1887] (Bourbier et Lamoureux, 1888, p. 245-247)

Paru aussi dans : La Révolte : organe communiste-anarchiste. — Paris : 1887-1894. — Année 4, suppl. litt. au nº 47 (8 aout 1891)

Il s’agit aussi du 12e titre de la série de chansons de Jouy reprises dans le le journal d’Émile Pouget, Le Père Peinard après le décès du chansonnier. Parue ici dans la (2e série, nº 42, du 8-13 aout 1897).