À mon ami Henri Brissac
« Tout Paris était hier soir à l’Hippodrome pour la seconde représentation des courses de taureaux…
« Quelques fanatiques de la Société protectrice des animaux ont cru devoir protester, mais sans grand succès. »
À l’aube, je vais à l’usine ;En sueur, sans jamais m’asseoir,Je me surmène, je turbine,Depuis le matin jusqu’au soir.Philanthropes, soyez plus chouettes ;Je vaux bien tous vos animaux.Aimez-moi du moins comm’ vos bêtes, / Vos chines, vos chats et vos taureaux ! (bis)Pour rien je travaille sans trêve ;L’exploiteur est mon picador ;Et lorsqu’à bout je me soulève,César est mon toréador.Hommes sensibles que vous êtes,Protestez contre mes bourreaux !Aimez-moi du moins comm’ vos bêtes, / Vos chines, vos chats et vos taureaux ! (bis)Quand j’attrape soixante ans d’âge,Le patron dit : « Il est trop vieux ! »Il m’envoie à l’équarrissageComme un pauvre cheval boiteux.Au lieu de faire des courbettesDevant mes cruels toreros,Aimez-moi du moins comm’ vos bêtes, / Vos chines, vos chats et vos taureaux ! (bis)Le sort me garde en récompenseLa mort, sans rien dans le fanal ;L’autopsie, au nom de la science,Sur un triste lit d’hôpital.Les travailleurs ont leurs squelettesDans les cabinets médicaux.Aimez-moi du moins comm’ vos bêtes, / Vos chines, vos chats et vos taureaux ! (bis)
23 janvier 1837