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Montjuich

Decrept, Étienne

Texte d’E.D. [Étienne Decrept] (≤1897).

lis sont assis dans des fauteuils
Et ils ont tous des galons d’or,
Passementerie qui les décore
Et qui les maintient dans l’orgueil.
Ils ont des visages sinistres
Où tous les vices semblent s’unir :
Vice du mensonge,
Vice de la chair,
Vice de l’inhumanité.
Et ils vont juger des hommes !
 
D’y songer j’en frémis, et d’épouvantement.
Je voudrais une tempête pour mes colères,
Pour rendre mes colères plus grosses, et faire
Alors les plus formidables rugissements !
 
Les autres, les martyrs,
Sur leurs bancs,
Écoutent les propos des juges.
Anéantis,
Ils sont là et ils attendent.
Leurs membres se rappellent des douleurs
Et leur raison pleure.
Ils ont été déjà vaincus
Une fois, deux fois, cent fois.
Dans leur prison toutes les tortures
Les ont roulés,
Et les cris provoquaient les rires !
Leurs souffrances
Donnaient naissance
À de la joie chez leurs bourreaux !
Ce sont des prêtres, ce sont des soldats, ce sonr
Des marchands, créateurs de hontes et d’orgies,
Qui ont ordonné qu’on les jetât en prison
Et qu’on leur arrachât toutes leurs énergies !
 
Les voilà condamnés,
Ceux-ci au bagne, ceux-là à mort.
Ah ! qui donc, d’eux ou des autres,
Sont les coupables ?
Quelle morale et quelle peur
Sont la morale et la peur
De ces hommes
Qui osent enfoncer des clous
Dans des chairs,
Qui osent enfoncer des clous
Dans des yeux clairs
Qui voient dans l’avenir tant et tant de beautés !

Montjuich, forteresse de Barcelone. Les condamnés à mort y sont exécutés.

Sur la procès de Montjuich/Montjuïc : https://ca.wikipedia.org/wiki/Proc%C3%A9s_de_Montju%C3%AFc

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Paru aussi dans : Le Libertaire (1895-1899), nº 62 (15-21 janvier 1897).