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Non ! Dieu n’est pas !

Châtelain, Eugène

Texte d’Eugène Châtelain (1878). Mus. par Julia Meurisse.

Ne pas confondre avec « Non, Dieu n’existe pas » anonyme de 1886.

Au citoyen Albert Goullé

1
S’il est un Dieu créateur de la terre,
Où donc est-il ? et qui donc l’a créé ?
Le croyant dit : C’est un profond mystère ;
Et c’est par lui que l’homme a procréé.
S’il est un Dieu, pourquoi fait-il les hommes
Lâches et vils, tueurs et criminels ?
Comment fit-il l’étendue où nous sommes ?
Et, tous ces feux qu’on dit être éternales ?
 
(Refrain)
Non, le soleil illuminant le monde,
Les astres d’or planant dans le ciel bleu,
Les océans où la tempête gronde
N’affirment point l’existence de Dieu !
 
2
S’il est un Dieu, pourquoi fait-il des nègres ?
Pourquoi noircir toute une race ainsi ?
Pourquoi du miel et pourquoi des fruits aigres ?
Pourquoi l’abeille et des frelons aussi ?
Pourquoi des rois et des foules vulgaires ?
Pourquoi de l’or aux uns ? aux autres rien ?
S’il est un Dieu qu’il empêche les guerres !
Pourquoi le mal domine-t-il le bien ?
 
refrain
 
3
Quand les volcans allument l’incendie,
L’homme ébahi s’avoue être ignorant.
Dans mille endroits, la mer s’est agrandie :
Pourquoi l’abîme et pourquoi le torrent ?
Pourquoi l’orage inonde-t-il les terres ?
Pourquoi les monts portent-ils des glaçons ?
S’il est un Dieu, pourquoi donc les tonnerres
Et leurs éclairs brûlent-t-ils les moissons ?
 
refrain
 
4
S’il est un Dieu, pourquoi donc la folie
Existe-t-elle en des cerveaux nombreux ?
Pourquoi faut-il qu’un pauvre s’humilie,
En se courbant, devant un homme heureux ?
Pourquoi voit-on des castes et des classes ?
Des fainéants raillant les travailleurs ?
Et des bourgeois volant les populaces ?
S’il est un Dieu, pourquoi des fusilleurs ?
 
refrain
 
5
S’il est un Dieu, pourquoi nous fait-il bêtes
À dévorer les autres animaux ?
Pourquoi fait-il disparaître nos têtes ?
Pourquoi nos corps souffrent-ils tous les mots ?
Puisque c’est lui qui, dit-on, nous protège,
Pourquoi la rage ? et le tigre qui mort ?
S’il est un Dieu, pourquoi fait-il la neige ?
Pourquoi le froid, la torture et la morts ?
 
refrain
 
6
Victor Hugo, tout croyant qu’il puisse être,
N’est qu’un rêveur, un sublime animal.
Dût-on jamais m’enfermer à Bicêtre,
`Comme Proudhon, je dis : Dieu, c’est le mal !
Dieu, c’est l’erreur ; oui, tout le démontre :
Pourquoi toujours l’imposer à nos fronts ?
S’il est un dieu, qu’il nous parle et se montre !
S’il est puissant, nous nous inclinerons.
 
refrain
 
7
Non ! Dieu n’est pas ! et je le dis aux prêtres,
Au pape, au czar, aux empereurs, aux rois,
Non, Dieu n’est pas ! Et vous, souverains maîtres,
Vous vous trompez pour nous ravir nos droits.
De votre Dieu s’écroule la légende,
La vérité guide à présent nos pas.
Devant les faits, le mensonge s’amende,
Et la raison nous dit : Non, Dieu n’est pas !
 
refrain

Bicêtre : référence à un asile d’aliéné.


Chanson parue dans Le Mirabeau, nº 458 (28 avril 1878).

Paru aussi dans : Le Roy, Achille. La Revanche du prolétariat. Paris : Librairie socialiste internationale, 1885 (p. 45-47).

Chanson parue aussi dans La Révolte des affamés, nº 10 (1er aout 1886).

Paru aussi dans L’Étincelle : chants, pensées et poésies révolutionnaires (1892), p. 6-7.

Paru aussi dans : Chants populaires. — Charleroi (Pennsylvania), 1896-1896. — [nº 1] (1896), p. 1.

Paru aussi dans Le Combat de Roubaix-Tourcoing (1906-1906), année 1, nº 35 (21 octobre 1906).