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Adieux à Aristide

Couté, Gaston


Texte de Gaston Couté (1911). Sur l’air « Tu t’en vas et tu nous quittes ! ».


Tu t’en vas et tu nous quittes,
Tu nous quitt’s et tu t’en vas ;
Tu peux t’trotter au plus vite
Aristide… on n’te r’tient pas.
Tout l’mond’ te dit ici
Au revoir… et merci !
 
En souvenir de ton passage
Plac’ Beauvau, charmant séjour,
Emporte, dans tes bagages,
La girofle’ de Lacour :
Tu peux y joindre tes
Seiz’ voix d’majorité !
 
Emporte ce surnom sinistre
Qui vint se plaquer un jour
Sur ta gueule de ministre
Et qu’tu garderas toujours :
Briand le renégat !
Emport’ ce surnom-là !
 
Emporte toute la haine
Des malheureux cheminots :
Ceux dont tu doublas la chaîne
Ceux qui sont dans les cachots ;
T’auras, en vérité,
Un’ rud’ charge à porter !
 
Ce règn’ d’horreur et de honte
Dont enfin voici le bout,
Ton règne, Aristide, compte
Un heureux jour malgré tout :
Et c’est — comm’ par hasard —
Le jour de ton départ !
 
Tu t’en vas et tu nous quittes,
Tu nous quitt’s et tu t’en vas ;
Disparais parmi la suite
Du cortèg’ de Mardi Gras :
Sal’ pantin, c’est l’moment
Allons, ouste !… Fous l’camp !

« Chanson satirique d’actualité » parue dans La Guerre sociale (1906-1915) (1er-7 mars 1911).

Le « rénégat » Briand est Aristide Briand (1862-1932), président du conseil des ministres et ministre de l’Intérieur, ancien avocat proche du syndicalisme-révolutionnaire et ancien partisan de la grève générale.

Place Beauvau, siège du ministère de l’Intérieur.

Lucien Lacour (1885-1944), militant de l’Action française, organisation royaliste. Il a agressé Aristide Briand lors de l’inuaguration de la statue de Jules Ferry le 20 novembre 1910. D’où l’expression giroflée, mot d’argot pour soufflet, gifle. Voir une autre chanson de Gaston Couté : « Discours d’Aristide devant le monument de Jules Ferry »