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Joie, aisance, ordre

Boyer, Maurice


Texte (chanson ou monologue ?) de Maurice Boyer (1937). “Air trop connu”.


1
Ils nous font tourner en bourriques
Nos impitoyables « nacos ».
Devant leur prose amphigourique,
Chacun s’exclame : « Qu’ès aco ! »
 
2
Renonçant à tondre les riches,
À défaut de soviets partout,
Ils ont couvert les murs d’affiches,
Afin de frapper un grand coup.
 
3
Ils veulent qu’on les aide à « faire
Un Paris où règnera (sic)
Joie, aisance, ordre »… Quelle affaire !
Ils cherrent bien dans le mastic.
 
4
Ces tortueux énergumènes,
Trop lus, trop vus, trop entendus,
Seraient-ils les catéchumènes
D’évangiles inattendus ?
 
5
À tous, une main fraternelle…
C’en est fini de Rodomont…
Ah ! vraiment, la rue de Grenelle
Est loin de la rue Damrémont !
 
6
La joie est le sel du bien-être…
Vive le bonheur simple et vrai !
Un jour, l’homme sera son maître,
Comme l’oiseau dans la forêt…
 
7
C’est la « Neuvième symphonie »
Oui… Mais on la joue, à Moscou,
Sans autre forme d’harmonie
Qu’une ou deux balles dans le cou !
 
8
L’odre est le calmant de la vie,
C’est le bismuth du genre humain.
Comme il régnait à Varsovie,
Règnera-t-il demain ?
 
9
Nous aurions cette alternative :
Vivre, toujours au garde à vous,
Ou bien crever — l’âme rétive —
Dans un cachot du Guépéou.
 
10
Si nous avons la complaisance
D’avaler tous leurs laxatifs,
Paris deviendra… lieu d’aisance !
Joli pour les contemplatifs !…
 
11
Car la ferveur démagogique,
Après nous avoir convaincus,
D’un coup de baguette magique,
Nous transformera tous en culs !
 
12
Las !… Honni soit qui mal y pense ?
N’ayant jamais eu de maintien,
Pour nos « nacos », sans révérence,
Alors, je montrerait le mien !

Nacos : Nationaux-Communistes

Rodomont : personnage de la commedia dell’arte, Capitan fanfaron ; aussi roi d’Alger dans Orlando furioso de Ludovico Ariosto (L’Arioste)

Rue de Grenelle (Paris) : rue avec de nombreux hôtels particuliers et plusieurs ministères (dont l’Éducation nationale, le Travail, …).

Rue Damrémont (Paris) : rue plus populaire ; une fusillade par les communistes contre les Jeunesses patriotiques y a eut lieu en 1925 (en janvier 1924, ce sont des libertaires qui furent victimes d’une fusillade communiste, rue de la Grange-aux-Belles).

Varsovie : allusion à l’expression « L’ordre règne à Varsovie », en 1831, du ministre français de la Guerre, après l’échec d’une insurrection contre la tutelle russe.


Publié dans Le Libertaire, 42e année, 4e série, nº 561 (5 aout 1937).