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Au drapeau !

Chambiet, Charles


Texte de Charles Chambiet (≤1910). Sur l’air : « Le Clairon » (1873 ?) de Paul Déroulède (1846-1914), musique d’Émile André.


1
Oyez l’histoire authentique
Et le récit véridique
De la blague d’un Gascon,
Qui souilla l’autre semaine,
— vraiment, ce n’est pas de veine ! —
Notre ville de Mâcon.
 
2
Ayant, dans la plaine large,
Vaillamment mené la charge,
L’étendard fut au retour,
Dans une chambre bien close
Pleine d’essence de rose
Remisé jusques au jour.
 
3
Le lendemain, chose horrible,
L’emblème était invisible,
Seul son étui nous restait.
Aussitôt le cri se jette :
— La loque est dans la tinette ! —
Chacun en fut stupéfait !
 
4
Le colon, vieux militaire,
Dit : — Nom de Dieu, quelle affaire !
Et dans quel siècle vit-on ?
Le pays tombe en ruines
Puisqu’on fait de nos latrines
Un glorieux Panthéon…
 
5
Lors, dans un élan sublime,
Plein d’un orgueil légitime,
Sans souci de maux de cœur,
Le colon — moment suprême ! —
Pour sauver le noble emblème
Plongea ses bras dans… l’odeur !
 
6
— J’ai vengé le sacrilège,
Dit-il, et ce privilège
Suffit à mon seul bonheur…
Tel celui de la Lorraine,
Ce drapeau fut à la peine :
Il faut qu’il soit à l’honneur.
 
7
Bien qu’il soit rempli de… colle
Il est toujours le symbole
Le plus noble et le plus beau.
Son saint contact purifie,
Mais, je vous le certifie,
Rien ne salit le Drapeau !
 
8
Celui-ci, dans la victoire,
Devait conduite à la gloire,
Nos régiments, aguerris…
Bien qu’il soit, — qu’Hervé me perde,
Aujourd’hui couvert de… crème…
Gloire à ce vaillant débris !…
 
9
Tout en présentant les armes,
Les soldats versaient des larmes
Tandis que le chef parlait.
Et qu’à ses paroles graves,
Dans le paradis des braves,
Saint Cambronne rigolait.

Cambronne : général napoléonien, célèbre pour le mot « merde », dit « mot de Cambronne ».


Paru aussi dans : Le Réveil artésien (1910-1911), nº 6 (1er mai 1910).