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L’Hydre noire

Galilée, Charles

Texte de Charles Galilée (1901).

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L’hydre, c’est la bête fabuleuse
Qui mange les petits enfants ;
C’est la fausse géante ténébreuse
Qui fait tous les maux triomphants ;
 
C’est la démente qui se targue, en joie
Par la souffrance et par l’horreur,
D’assombrir l’astre nouveau qui rougeoie
Aux flancs de ta terre en vainqueur :
 
C’est la fourbe et méchante éducatrice
Des victimes des indolents :
C’est la sombre hypocrite provocatrice,
C’est la meute de chiens hurlants ;
 
Hurlant la mort et la honte et le crime
Par la géhenne de malheur !
Hurlant aux bords d’un précipice : abîme
Où la foule jette son cœur !
 
C’est l’hydre noire et ses cent mille têtes
Et ses cent millions de bras
Qui mènent et frappent les masses prêtes
À sacrer qui les châtiera !
 
C’est la bassesse assise sur l’idole
À l’ombre de la lâcheté !
C’est ta sanie accouplée au symbole
Pour infester la vérité.
 
Enfin ! C’est la religion : infâme !
Déséquilibrant les cerveaux :
Atrophiant la conscience et l’âme
Pour en faire : Proie à corbeaux !
 
C’est la moralisatrice immonde
Introduisant l’insanité
Afin de prédominer par le monde
La joie et la simplicité.
 
C’est la proxénète qu’il faut proscrire
À jamais de l’humanité,
Pour que l’homme parvienne à s’inscrire
Au livre d’or de la beauté !
 
Pour les petits qui viendront, demain, prendre
Ici-bas leur part d’horizon…
Il faut chasser l’hydre noire et la pendre
Au grand gibet de la maison.

Paris, le 18 avril 1901


Paru aussi dans : Le Libertaire, 3e série (1899-1901), in nº 72 (6-13 juillet 1901).