Le Meeting des Invalides

Malgré la loi, devant les Invalides,

Vous avez vu se rassembler soudain

Des ouvriers au visage livide, Jetant ce cri :

Du travail ou du pain !

À ce long cri poussé par la misère

A répondu celui des dirigeants :

L’ouvrier peut souffrir, mais doit se taire :

S’il a faim, il doit rogner ses dents

 

Refrain

Ah ! craignez le flot populaire

Si l’ouvrier gronde, c’est qu’il a faim ;

Vous ne pourrez conjurer sa colère

Qu’en lui donnant du travail ou du pain.

 

Ô dirigeants, mesquins opportunistes,

Intransigeants et fameux radicaux !

Vous ne voulez voir que des monarchistes

Dans ceux de nous qui vous montrent leurs maux !

Ah ! méprisez l’ouvrier qui souffre,

Calomniez, insultez, pauvres fous !

Vous ne voyez donc pas s’ouvrir le gouffre

Où vont sombrer vos mensonges et vous ?

 

refrain

 

Depuis longtemps déjà manque l’ouvrage,

Et l’ouvrier, las de chercher en vain,

À chaque instant consulte son courage,

Doit-il voler ou bien tendre la main ?

Mais mendier, voler est une honte,

Et, cependant, il faut manger enfin !

Alors, pousse, le travailleur affronte

Fusils, soldats, ne sentant plus de frein.

 

refrain

 

Ah ! vous croyez, pour détourner l’orage,

Qu’il vous suffit de semer la terreur,

Le plomb, le fer, les menaces, l’outrage,

Non, rien ne peut nous inspirer la peur.

Lorsque la faim déchire les entrailles

Du malheureux qui se couche le soir,

Croyez-vous qu’il craigne vos mitrailles ?

Pour lui, la mort n’est plus qu’un sombre espoir.

 

refrain