Accueil > Chansons > Le Droit d’asile

Le Droit d’asile

Clovys


Texte de Clovys (≤ 1926). Musique par Louis-Alexandre Droccos (18..-1926).


À tous ceux qui payèrent de leur liberté, de l’exil, de leur vie, l’exercice d’un droit reconnu sacré, même par les inquisiteurs du Moyen-Age (NdA).

1
Je me souviens d’un soir d’hiver
Que le brouillard faisait plus sombre
Qu’en cheminant, j’ai écouvert
Un pauvre chien blotti dans l’ombre…
Voyant se mirer dans ses yeux
La mort grimaçante et blafarde,
J’emportai, jusqu’à ma mansarde,
Le chien transi, le chien pouilleux.
 
Puis, je partageai mon repas
Avec la bête abandonnée
Heureux de sauver du trépas
Son existence condamnée
Mon logis où fut recueilli
Le chien souffreteux et docile
Dès ce jour est resté l’asile
Où le malheur est accueilli.
 
2
Je me souviens qu’un jour d’été
Des chasseurs parcouraient les routes ;
Car !a meute avait dépisté
La biche lointaine aux écoutes !
Tremblante elle entra dans le bois
S’acheminant vers la rivière
Mais alors j’ouvris ma chaumière
À la douce biche aux abois !
 
Refrain
Et, lorsque retentit le cor
Égrenant partout dans la plaine,
Son lugubre appel à la mort,
La biche avait repris haleine !…
Puis sous les ténèbres du soir,
Elle s’enfuit, vive et gracile
Du lieu qui lui servit d’asile,
Et la fit renaître à l’espoir !
 
3
Mais je me souviendrai longtemps
De l’abominable curée
À laquelle un soir de printemps
Se livra la foule égarée,
Un homme en était le gibier ;
Puis, avec des remous d’émeute,
Le peuple figurait la meute
Et coudoyait le policier !
 
Refrain
Et quand l’homme affolé, meurtri
Par l’impitoyable poursuite,
Vint me demander un abri,
Mon cœur me dicta ma conduite,
Sans me soucier de la raison
Qui déchaînait la meute hostile,
À l’être inquiet et sans asile
J’ouvris largement ma maison !

Publié aussi dans le recueil nº 16 (1928) de Nos chansons (1920-1930) de La Muse rouge.