1Moi je soutiens que l’homme est bon, j’en ai la preuve.…Pourquoi vous récrier, l’idée est-elle neuve ?Est-il donc bien prouvé que l’homme soit méchant ?Non, car Amour ! Amour ! voilà l’éternel chant,La grande nourriture et du corps et de l’âme ;Et si tu croules, vieil ordre social infâme,C’est que nous manquons tous ou de pain ou d’amour ;C’est que ton égoïsme aux serres de vautourNous fait mourir en nous arrachant les entrailles.Cœurs lâches, asservis à des ventres canailles,Au fond je vous plains plus encor que je vous hais.Vous vivez moins bien que les fauches des forêts ;Égoïstes et vains le sont-ils ? Ils sont bravesS’ils sont féroces ! Ils sont libres, vous esclaves !Car il n’en est pas un de libre entre vous tousPas plus qu’il n’en est un d’heureux, entendez-vous ?…Alors ce monstrueux mensonge, pourquoi faire ?2Ta vertu femme-esclave : Amour effet contraire !De Famille et Patrie admire les tableaux,Monstrueux composé de larme et tombeaux ;Mais cela sert si bien Monsieur Tyran ton maître !3Si tu voulais ouvrir plus large la fenêtre !Si tu voulais fouiller plus loin dans l’horizon,Homme ! laisser parer ton cœur et ta raison ;Du Vrai, du Bien, du Beau, tu saurais les extases,Tu chanterais la loi d’amour aux simples phrases ;Dès lors tu cesserais d’être si malheureux.Arrache de ton cœur leur amour cancéreux,Source horrible d’un pus d’égoïsme qui ronge !Que le culte du Vrai remplace le mensonge.Ta souffrance est à moi, mon bonheur est le tien ;Physiquement notre être a le même lien ;Du mal d’un petit doigt tout le corps s’inquiète,Comment du deuil de l’un l’autre ferait-il fête ?Ton bonheur a son nid dans le bonheur commun ;La loi dit : Un pour tous ! et puis : Tous pour chacun !En dehors de ce cercle il n’est point d’harmonie.Le bonheur, la raison d’être de notre vie,Où le trouveras-tu, si ce n’est dans l’amour !Vas-tu nourrir un corps bestial au jour le jour ?Ce n’est plus vivre alors, c’est un affreux suicide !On ne vit qu’en aimant. Veux-tu mourir ? Décide.
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Amour harmonique
Paillette, Paul
Texte de Paul Paillette (1887).
Chanson ou monologue paru dans L’Autonomie individuelle (1887-1888), p. 72-73 (nº 5, sept.-oct. 1887).