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Chacun vit de son métier

Pottier, Eugène


Texte d’Eugène Pottier. Médaille d’argent au Concours de la Lice chansonnière, 22 août 1883.


Médaille d’argent au Concours de la Lice chansonnière, 22 août 1883.

Buvant la goutte, un croque-mort
Dit au commissaire :
« La besogne, ne va pas fort
 » Dans le funéraire.
 » Avec six enfants, cher Thomas,
 » Sans pourboire on est vite à bas.
 » Le mort ne va guère !
 » Le mort ne va pas !
 
 » Dieu sait comme un printemps malsain
 » Nous est nécessaire
 » Ça fait gagner le médecin
 » Et l’apothicaire.
 » Cercueils de plomb, marbre, vieux draps ;
 » Le mort fait vivre tant d’états…
 » Le mort ne va guère !
 » Le mort ne va pas !
 
 » La fosse commune va bien
 » Dans ce cimetière ;
 
 » Oui ; mais ça ne rapporte rien,
 » La classe ouvrière,
 » L’hôpital les fournit par tas,
 » Et nos choux n’en sont pas plus gras.
 » Le mort ne va guère !
 » Le mort ne va pas !
 
 » On prévoyait deux morts cossus
 » Dans le ministère ;
 » Je comptais payer là-dessus
 » Mon propriétaire.
 » Pas de chance ! Hier au plus bas,
 » Les voilà tirés d’embarras !
 » Le mort ne va guère !
 » Le mort ne va pas !
 
 » Le mort, c’est vrai, met en chagrin
 » Bien des gens sur terre.
 » Mais, que veux-tu ? c’est notre pain.
 » Chacun son affaire.
 » Je n’ai mis les deux bouts, Thomas,
 » Qu’au bon temps des deux choléras,
 » Le mort ne va guère !
 » Le mort ne va pas !

Paru aussi dans : Pottier, Eugène. — Chants révolutionnaires. — Paris : Dentu, 1887 (p. 99-100).

Paru aussi dans : Pottier, Eugène. — Chants révolutionnaires. — Paris : Comité Pottier, 1908 (p. 76-77).

Paru aussi dans : Pottier, Eugène. Brochon, Pierre (éd.). — Œuvres complètes. — Paris [France] : Maspero, 1966 (p. 189).