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L’Internationale des enfants

Faure, Sébastien


Texte et musique de Sébastien Faure (1897 ?).


Debout ! les enfants de tout âge,
De tout sexe et de tout pays ;
Debout ! En un libre langage,
Proclamons le « Droit des Petits »,
On nous parle d’obéissance
Aux devoirs, aux Respects, aux Lois
Qui courbent sous le joug de l’enfance ;
Eh bien ! Que fait-on de nos Droits ?
 
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
 
On veut avoir une jeunesse,
Belle de santé, de vigueur,
Exempte de toute faiblesse,
Entraînée aux rudes labeurs.
Qu’on nous garde de la misère
Qui nous étreint dès le berceau :
Alors on ne verra plus guère
Que jeunes gens sains, forts et beaux.
 
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
 
On aime les jeux à notre âge ;
On a besoin du mouvement ;
On aime à faire du tapage,
On s’amuse, on rit follement.
Devenus des femmes, des hommes,
Tout le jour nous travaillerons ;
Mais, tant que des enfants nous sommes,
Jouons, chantons, sautons, courons.
 
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
 
L’école est souvent une geôle,
On n’y parle que de punir ;
Captifs, les petits n’ont qu’un rôle :
Écouter, se taire, obéir.
Au diable toute pénitence !
Le travail fait joyeusement
Deviendrait une récompense,
L’étude est un divertissement.
 
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
 
Il est vrai qu’il nous faut apprendre
Si, plus tard, nous voulons savoir ;
Mais nous entendons tout comprendre,
Tout raisonner, tout concevoir.
Ce qu’on lit dans pas mal de livres,
À pour but de nous hébéter ;
Nous sommes faits pour vivre libres ;
L’enfant doit pouvoir discuter.
 
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
 
Nous ne voyons dans notre père
Ni chef, ni maître, ni patron ;
Il est pour nous comme un grand frère,
Un bon guide, un cher compagnon.
Notre mère, c’est notre aînée ;
Pour nous, elle est « la grande sœur » ;
Ainsi la famille ordonnée,
Nous ne sommes qu’un même cœur.
 
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
Nous voulons manger, boire,
Chanter, rire, danser.
Nous ne voulons plus croire,
Mais savoir et penser.
 
Partout les petits sont nos frères ;
De tous nous sommes les amis ;
Notre cœur n’a pas de frontières ;
Entr’aimons-nous ; soyons unis.
Si les grands rêvent de tuerie,
Rêvons, nous, de fraternité ;
Dans l’universelle Patrie,
Organisons l’Humanité !

Publié aussi dans le recueil nº 8 (1923) de Nos chansons (1920-1930) de La Muse rouge.

Paru aussi in : Manfredonia, Gaetano. — Libres ! Toujours… : anthologie de la chanson et de la poésie anarchistes au XIXe siècle. — Lyon : Atelier de création libertaire, 2011 (p. 129).