À [Zéphirin] Camélinat, membre de la Commune.
Voyez ce bâtiment doré,Des badauds si fort admiré,Mais de solidité factice.Cave tassant, gros mur fendu,L’étayer serait temps perdu.Cette propriétéCroule de vétusté,Il est temps qu’on la démolisse !Un banquier loge à l’entresol :Là, de l’industrie et du sol,Il pompe tout le bénéfice.Des lingots que l’usure y fond,Le tas monte jusqu’au plafond.Cette propriétéCroule de vétusté,Il est temps qu’on la démolisse !Un spéculateur au premier,En baisse égorgeant le fermierDe la grêle se fait complice.Le mur fait ventre sous le grain,Pour vendre, il attend… qu’on ait faimCette propriétéCroule de vétusté,Il est temps qu’on la démolisse !Une belle aux yeux lucratifsAttire au second les oisifs,Son luxe y chatouille le vice ;Concerts et bals, dans la saison,Font la nuit trembler la maison…Cette propriétéCroule de vétusté,Il est temps qu’on la démolisse !Au-dessus pèse un gros rentier.De naissance il fait ce métier,Mange, boit, prend de l’exercice.Sans impôt, ce bon citoyenConsomme en paix, ne produit rien.Cette propriétéCroule de vétusté,Il est temps qu’on la démolisse !Toute la famille à l’étroitGrelotte sans pain sous le toit,Déjà le père est à l’hospice ;Par la tuile ouverte, la mortSe glisse avec le vent du nord…Cette propriétéCroule de vétusté,Il est temps qu’on la démolisse !Un grand corps de garde est en bas,Ces pauvres diables de soldatsBâillent en faisant leur service.La sentinelle nuit et jourY garde en vain monsieur Vautour…Cette propriétéCroule de vétusté,Il est temps qu’on la démolisse !
Paris, 1848.