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Les Fonctionnaires

Jouy, Jules


Texte de Jules Jouy (1888).


À Adolphe Bonnet

« Sans sortir de la métropole, il est facile de constater combien le fonctionnaire s’est développé et se développe de jour en jour, avec ses exigences, son autoritarisme mesquin, son impertinence aussi traditionnelle que son inutilité, dans la plupart des cas » (John Labusquière, Cri du peuple d’hier)

Monsieur, avant de se coucher,
À la lueur d’une chandelle,
Féroce, est en train de chercher
L’insecte, au bois de lit fidèle.
Le fatal soufflet, braqué sur
Les coins, refuges ordinaires,
Il massacre d’un coup d’œil sûr,
Des masses de fonctionnaires.
 
Madame, montrant ses appas,
Examine, pleine d’astuce,
Son corps blanc, où prend son repas,
Cynique, une invisible puce.
Elle inspecte chaque côté
Avec des airs peu débonnaires.
La coquette, sur sa beauté,
Fait la chasse aux fonctionnaires.
 
Bébé, dans ses beaux cheveux blonds,
Passe sa main douce et se gratte.
D’insaisissables bataillons
Marchent sur sa peau délicate.
Le même, inquiet et nerveux,
Se plaint de ses « pensionnaires ».
Dans l’épaisseur de ses cheveux,
S’engraissent des fonctionnaires.

11 février 1888


Paru dans : Jouy, Jules. Chansons de bataille. Paris : Marpon & Flammarion, 1889, p. 40-41

Paru aussi in : La Révolte : organe communiste-anarchiste. — Paris : 1887-1894. — Année 4, suppl. litt. au nº 48 (8 aout 1891)

Il s’agit aussi du 19e titre de la série de chansons de Jouy reprises dans le le journal d’Émile Pouget, Le Père Peinard après le décès du chansonnier. Parue ici dans la (2e série, nº 61, du 19-26 décembre 1897).

Paru aussi in La Voix du peuple : organe officiel de la Fédération des unions ouvrières de la Suisse romande (Lausanne, 1906-1914), in 5e année, nº 30 (23 juillet 1910).