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La Ronde des gueux

Perceau, Louis


Texte de Louis Perceau (1903 ?).


1
Écoutez ! Des champs à l’usine,
De l’océan jusqu’à la mine,
De tous les bagnes où s’échine
L’ouvrier comme un animal,
Monte une plainte continue,
Le râler d’un rut mondiale…
C’est la terre qui se pollue
Sous l’étreinte du Capital !
Pâle soleil d’hiver, de ta lueur tremblante
Tu éclaires, blafard, ce concert d’épouvantes…
Dormez, bourgeois heureux !
Ces parais râlant, hideux, vous suent des rentes :
C’est la Ronde des Gueux,
Le Peuple chante !
 
3
Regardez : cette boucherie,
Ces os broyés, ces chairs meurtries.
Tous ces corps étendus sans vie,
Ce sont les corps des exploités
Qui, pendant que vous faisiez ripaille,
Riant de leur naïveté,
Allaient crever dans les batailles,
Pour sauver vos propriétés !
Un voile ensanglanté couvre la plaine immense,
Où la mort, par milliers, fauche les existences.
Riez, bourgeois joyeux !
C’est pour vous que ces fous se font trouer la panse,
C’est la Ronde des Gueux,
Le Peuple danse !
 
3
Mais attendez ! votre heure sonne,
Votre glas, aux échos résonne.
Vous n’exploiterez plus personne !
Vos esclaves en ont assez.
Allons ! des chaumières aux bouges,
Debout prolétaires, venez…
Et s’il nous faut un drapeau rouge,
C’est vous, bourgeois qui le teindrez !
De son disque empourpré, chassant la nuit profonde,
Le soleil d’équité incendie le vieux monde.
Tremblez, bourgeois peureux !
Voici venir la fin de votre immonde.
C’est la Ronde des Gueux,
Le Peuple gronde !

Paru dans Le Réveil syndical (Lens & Hénin-Liétard), nº 10 (1903, 28 juin).