Accueil > Chansons > La Peur

La Peur

anonyme


Compagnon anonyme de Limoges (1889). Air : « Si Paul Brousse était emp’reur » [= « Les Services publics »] de Lucien Weill ?


« Un copain de Limoges m’expédie la chanson ci-dessous ; la miousique, je m"y connais autant qu’à ramer des choux, — mais foutre, y en a qui en pincent ! » Le Père Peinard [Émile Pouget].

Si tu voyais choir la sacoche
D’un gros richard sur ton chemin,
Tu la mettrais vit’ dans la poche.
Sans avoir de scrupule vain.
Qui donc l’empêch’ de l’aller prendre
Dans son logis, si c’ n’est la Peur
De la prison ! J’os’ le prétendre :
Sans la Peur, tu s’rais voleur ! (bis)
 
Vois en passant d’vant les boutiques
Pain blanc, gâteaux et saucissons.
T‘en prendrais ben, pauv’ famélique,
Mais hélas queque chos’ te dit non !
T‘iras crever pour une borne,
Pauvre déchard, grâce à la Peur
Des tribunaux et des tricornes :
Sans la Peur, tu s’srais voleur ! (bis)
 
Tu vois partout que tout abonde,
Habits, vivres et ripatons
Tout ça doit être à tout le monde,
À toi qui couches sous les ponts.
L’oiseau du ciel prend sa pâture
Ou qu’il en trouve. Il n’a pas Peur
Des lois et d’la Magistrature,
Car rien n’l’empêche d’être voleur. (bis)
 
Tu te contentes d’anathèmes
Qu’t’envoies à la Société.
R’viens de ta bêtise suprême,
Ris des lois et des préjugés :
Ou crève la faim et sois honnête
Ou comme l’oiseau n’aies plus peur :
Mang’ comme lui, maligne bête
Et ne crains pas d’être voleur. (bis)
 
Toutes les lois qu’on pourrait faire,
S’ront toujours faites contre toi.
Y en as qu’un’ quif’rait ton affaire,
L’article uniqu’ de cette loi
Serait l’suivant : « sont abrogées
Les précédentes lois en vigueur. »
Dès qu’cet’ loi serait promulguée
Y’aurait plus d’volés, d’voleurs ! (bis)
 
Car avec une loi pareille
Les richards on expropri’rait
L’anarchie, aurore vermeille,
Su’ l’Mond’ Nouveau resplendirait.
Alors seule la libre entente,
Ferait s’mouvoir les travailleurs,
Plus d’lois ! Quelle harmonie touchante
Alors y’aurait plus d’voleurs ! (bis)

Parue dans le numéro 44 (28 décembre 1889) du Père Peinard.

Extrait de la chanson citée de Lucien Weill (1865-1914) [alias Henri Dhorr ], l’un des gérants du Père Peinard.

Pour fètr le grand centenaire.
Il faudrait que l’Exposition
Vit éclore une nouvelle ère :
L’èr’ de la Révolution.
J’en ai soupe d’la République !
Il est un régime meilleur :
C’est celui du servie’ public, que
Si Paul Brousse était empereur !
 
Depuis janvier jusqu’en décembre
On vivrait en plein’ liberté ;
Du parti ouvrier chaqu’membre
À son tour serait député.