Au vigneron champenois.
Lorsque t’entendais parler au village,Brave homme à la têt’ dur’ comm’ ton sabot,De l’Action directe et du Sabotage,Tu restais vitré comme un escargot ;Calme paysan des coteaux tranquilles,Au fond d’ta jugeot’ tu pensais comm’ ça :« C’est des inventions des gâs de la villeEt, moi, je n’peux pas comprendr’ ces chos’s-là ! »Si les exploiteurs qui pressur’nt tes frères,Pauvres ouvriers, pauvres citadins,Font l’geste d’abattr’ leurs griff’s sur ta terreTa vieill’ « comprenoir » se réveill’ soudain :Paysan, t’es pas si bêt’ qu’on supposeNi qu’tu veux l’faire croir’, sacré nom de d’la !Si ton intérêt se trouv’ mis en causeT’as rud’ment vit’ fait d’comprendr’ ces chos’s-là !Aujourd’hui, voilà c’qui s’pass’ dans la MarneD’après les dernièr’s nouveil’s des journaux :Au sac des celliers la foule s’acharneBrisant les bouteill’s, crevant les tonneaux ;Les ruisseaux débord’nt de flots de champagneEt les vign’s avec leurs grands échalasSont comm’ des bûchers au coeur des campagnes…Foutre ! t’as grand’ment compris ces chos’s-là !Esclav’ des usin’s, esclav’ de la terre,Les vœux de nos cœurs sont les mêmes vœux :Tous deux nous souffrons de la mêm’ misère.Nous avons le même ennemi tous deux !Paysan, mon vieux, allons, que t’en semble ?Pour la grande lutt’ qui bientôt viendra,Donnons-nous la main et marchons ensembleÀ présent que t’as compris ces chos’s-là !