Minuit, bourgeois, c’est la fin de la grève,Et l’homm’-poisson de la place BeauvauS’en est venu chasser les mauvais rêvesQui d’puis quéqu’ temps chahutai’nt vot’ cerveau.Les militants gis’nt au fond de ses geôles,Sous le collier rentrent les travailleurs,Allons, bourgeois, remercier le drôleBriand ! Briand !Voilà votre Sauveur !Ancien apôtr’ de la grèv’ générale :C’est grâce à lui que vous pourrez encorPour quelque temps caresser d’vos mains salesL’or entassé dedans vos coffres-fortsAllez, bourgeois, saluer votre maîtreEt cavalez bien vite à l’IntérieurPorter l’encens et la myrrhe à ce traîtreBriand ! Briand !C’est lui votre Sauveur !Allons, bourgeois bégueules et sévères,Fait’s pas d’chichis : il est pour vous grand tempsDe pardonner l’histoir’ de Saint-Nazaire :Ouvrez-lui donc la porte à deux battants !Recevez-le au sein de vos famillesEt, pour lui faire encore plus d’honneurMariez-le avec toutes vos filles.Briand ! Briand !C’est lui votre Sauveur !Pourtant, bourgeois, si c’est fini la grève !Chantez votre triomph’ modestementCar, de cett’ lutte où l’exploité se lèveVous ne voyez que le commencement.Comme on reçoit’ toujours ce que l’on sèmeIl se pourrait, ma foi ! que tout à l’heur’Il n’arriv’ pas à se sauver lui-même,Briand ! Briand !Il est frais le Sauveur !
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Le Sauveur
Couté, Gaston
Texte de Gaston Couté (1910). Sur l’air « Minuit Chrétien, c’est l’heure solennelle ».
« Chanson satirique d’actualité » parue dans La Guerre sociale (1906-1915), 4e année, nº 45 (19-25 oct. 1910).
Place beauvau, siège du ministère de l’Intérieur ;
Aristide Briand (1862-1932), président du conseil des ministres.