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Avant-terme !

Clovys


Texte de Clovys.


1
La veill’ du term’ je m’aperçus,
Qu’mon pauvr’ propriétaire,
Ne pourrait contre son reçu,
Palper la somme entière ;
Je m’dis mon loyer,
J’peux pas lui payer,
Que le diable me pende !
Déjà je lui dois
L’arriéré d’six mois,
Bah ! vaut mieux qu’il attende ! (bis)
 
2
J’étais en plein’ méditation,
Quand mon probloc s’amène,
La bouche en « chose » de croupion,
Les mains sur l’abdomen…e ;
Derrièr’ lui l’pip’let
Armé d’ son balai,
Souriait d’un air tendre,
Mais l’vautour me dit :
Payez aujourd’hui,
Ou demain j’vous fais vendre ! (bis)
 
3
Ainsi moi, pauvr’ ouverrerier
Toujours dans la misère,
Je verrais mon « beau » mobilier
Bazardé à l’enchère ;
Mon lit démoli
Et ma tabl’ de nuit,
– J’en frémis qu’en j’y pense –
Chez un brocanteur
Iraient, sans pudeur
Finir leur existence. (bis)
 
4
Ma Jocond’ sur l’point d’accoucher
En éprouva tant d’peine,
Qu’chez sa mèr’ ell’ s’en fut s’coucher
Pour plus d’une semaine ;
Ça n’était pourtant
Pas encor’ l’moment,
Mais l’soir mêm’ je d’vins père
D’un p’tit nouveau-né
Qu’était né mort-né,
Bon dieu, qu’ell’ sale affaire ! (bis)
 
5
Heureus’ment le soir descendit
Comm’ toujours, sur la terre,
Et fit entrer, dans mon taudis
Un tas d’autr’s locataires ;
Des typ’s syndiqués
Pas bien astiqués,
Mais d’allure énergique,
Qui se mir’nt en d’voir
D’tout foutr’ sur l’trottoir,
Au nom d’la république ! (bis)
 
6
Le lend’main, quand le jour revint
À l’heur’ protocolaire,
Où s’éveillent les marchands d’vin,
L’huissier saisi… d’colère,
Avec mille agents
Et trois régiments,
M’attendaient de pied ferme,
Mais l’déménag’ment
Tout comm’ l’accouchement
S’était fait « avant terme » ! (bis)

Une chanson en l’honneur de Vautour [1]


http://anarlivres.free.fr/pages/biblio/complements_texte/ChansonsClovys.html


[1Au début du siècle, M. Vautour représente le propriétaire, à la base du pouvoir à l’époque, haï car il est sans pitié et a tous les droits, notamment celui de faire signer à chaque nouveau locataire un congé en blanc. Au moindre comportement déplaisant ou retard de paiement, c’est l’expulsion. Voir Georges Cochon, « le mouvement des locataires ».