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Patrie

Avray, Charles d’


Texte et musique de Charles d’Avray (ca 1912). Harmonisé par Laurent Fossati (18..-1931).


Non, la patrie n’est rien devant la science

1
Des peuples l’origine était prise pour base,
De Patrie aussitôt le principe s’écrase,
L’ensemble était à tous chez les premiers terriens,
Pourquoi sur le commun avoir fondé des biens ?
Oui, tout n’est ici-bas qu’énergie et matière,
La richesse n’est donc que dans la masse entière,
La Patrie évolue en cette absurdité
Et renferme en son nom le mot “Propriété”.
 
Propriété nous engendre finance,
À la finance on joint l’exploitation,
L’exploitation fait naître la puissance
Et la puissance exige obéissance.
L’obéissance est preuve d’ignorance
Et fait entrave à notre évolution.
En limitant le droit à l’existence, / Le capital détruit la production. (bis)
 
2
Quand du patriotisme on veut suivre les traces,
On ne trouve que gens faux, cruels et paillasses,
Dans tout patriotard le jésuite est caché,
La conscience chez lui suit le cours du marché.
Empire ou Royauté, Commune ou République,
Le chauvinisme est là dans toute politique,
La patrie est l’orgueil indiscutablement
Et renferme en son nom la mot “Gouvernement”.
 
Gouvernement veut dire agiotage,
Gouvernement veut dire autorité,
L’autorité fait naître le servage,
Par le servage on détruit le courage,
Découragé l’on vit dans l’esclavage
Et c’est ainsi que va la société.
Vous travaillez à cet ignoble rouage, / Tas d’abrutis, quand vous allez voter. (bis)
 
3
La Patrie a mis l’homme au niveau de la bête
En te déclarant prêt et bon pour la conquête,
La civilisation traîne le lourd fardeau
Qui cache l’alcool dans les plis d’un drapeau.
On pille, on incendie, on viole, on assassine,
On colonise enfin quand l’ivresse domine.
La Patrie est le vice avant l’égorgement
Et renferme en son nom le mot “Régiment”.
 
Pour la Patrie on traça des frontières,
Pour la frontière il fallut des Soldats,
Pour le soldat des armes meurtrières,
Vinrent alors les combats sanguinaires.
L’histoire ensuite enregistra les guerres
Où sont tombés tant de ces pauvres gars.
Si vous saviez ce qu’ont pleuré des mères, / Jeunes conscrits, vous ne partiriez pas. (bis)
 
4
S’apercevant combien était faible son œuvre,
Le patriote a joint la tigresse à la pieuvre,
Par l’esprit religieux il se fit seconder,
C’est ce qui lui permit longtemps de galvauder.
Cet esprit mensonger a traversé les races,
Trône encore chez les grands et dans les populaces,
La Patrie est l’erreur des humaines légions
Et renferme en son nom toutes les “Religions”.
 
Des religions passons à l’analyse
Et dans l’histoire étudions leurs mandats.
Le Rabbin, lui, le premier dogmatise,
Le Prêtre ensuite, un beau jour, catéchise,
Puis le Pasteur plus tard évangélise
Et chacun d’eux seconde les États.
Le Patriote à son tour fanatise, / À sa doctrine hommes ne croyez pas. (bis)
 
5
Au diable le respect du principe “Patrie”
Que la réalité vainque l’idolâtrie.
Certain jour, contre nous, commandé de sévir,
De tes armes, conscrit, sache bien te servir.
Dans la lutte, vois-tu, l’or des galons attire,
Ne sont-ils pas pour l’œil de jolis points de mire ?
Que tes balles jamais ne nous percent les flancs,
Conscrit fais volte-face et rentre dans nos rangs.
 
C’est dans nos rangs que tu vis la misère,
C’est dans nos rangs que tu connus l’amour,
C’est par amour que tu devins un frère,
Frère envers nous reste donc solidaire.
Et fous au feu cet habit militaire,
Le Sans-Patrie est à l’ordre du jour
Main dans la main, vivons sur cette terre, / Vers le bonheur cheminons tour à tour. (bis)

Chanson « Patrie » de Charles d’Avrays (1/2)
Chanson « Patrie » de Charles d’Avrays (2/2)

Chanson publiée chez A. Dorey « Aux 100 000 chansons » (Paris & Charleroi) ». Créée par Ch. Guerey dans les Concerts de Paris.

Publié aussi dans le recueil nº 3 (1921) de Nos chansons (1920-1930) de La Muse rouge.