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Les Conscrits

Clément, Jean Baptiste


Texte Jean Baptiste Clément (≤ 1900). Musique (1901) par Eugène Manescau (1869-1940).


1
On tire au sort de par l’loi,
Que ce soit pour la République,
Pour la Badingue ou pour le roi,
On s’y soumet et sans réplique.
On s’y soumet et cependant,
C’est du chagrin pour père et mère.
Pour les bons vieux c’est la misère…
Et les conscrits s’en vont chantant !
 
2
Vous ne vous souvenez donc pas
Des tristes jours de votre enfance,
Où le père, rentrant bien las,
Vous racontait son existence,
Où la famille en l’écoutant,
Sans sou ni maille en plein décembre,
Pleurait dans un coin de la chambre…
Et les conscrits s’en vont chantant !
 
3
Vous n’aimez donc pas les bons vieux
Qui, pour vous donner la becquée,
Ont travaillé comme des gueux,
Et dont la vie est disloquée.
Oubliez-vous qu’en les quittant
Vous voilà gibier de caserne,
Avec du plomb dans la giberne…
Et les conscrits s’en vont chantant !
 
4
Avec un fusil dans la main,
Du plomb pour tuer père et mère,
Quand, sans travail, manquant de pain,
Les ouvriers crieront misère.
Ils le savent, et, cependant,
Ils ont la gloriole en tête,
Toute la famille est en fête…
Et les conscrits s’en vont chantant !
 
5
Enrubannés et tout fleuris,
Comme pour un jour de kermesse,
Parés de leurs plus beaux habits,
Ils vont enterrer leur jeunesse,
Et pourtant, ce qui les attend
Au moindre cas d’indiscipline,
C’est Biribi, la crapaudine…
Et les conscrits s’en vont chantant !

Paru dans : Clément, Jean-Baptiste. — La Chanson populaire. — Paris : Bibliothèque ouvrière socialiste, 1900. — 64 p. (p. 56-57).

Éditeur : G. Ondet (Paris), 1901.

Paru aussi in : La Voix du peuple : journal syndicaliste paraissant le dimanche ; organe de la Confédération générale du travail (1900-1918), nº 700 (23 février-1er mars 1914), spécial « Conseil de révision 1914 ».