Aux intelligents (?) et compétents (??) « toubibs », en joyeux et irrespectueux souvenir.
1Dans un hôpital militaireOù vienn’net fantassins et tringloisLes malad’s ont, pour se distraite,Un méd’cin-major rigolo ;Chaqu’ jour c’est un’ vraie comédieCar ce docteur très délicatPrétend guérir tout’s maladiesPar l’ipéca.2Des casernements à la rondeLes poilus vienn’t se présenter.Et le plus sérieus’ment du mondeIl se met à les ausculter ;Puis il dit, de sa voix aimable :« Mais… ça provient d’votre estomac !« Il vous faut, pour un cas semblable,« De l’ipéca ! »3Un typ’ qui portait des lunettesLui dit : « Major, j’ai d’mauvais yeux,« J’distingu’ mêm’ plus vos baïonnettes. »Mais il lui répond : « Scrongnieugnieu !« Si vous avez la vue si basse« Ça provient de votre estomac !« Il vous faut prendre, pour que ça se passe,« De l’ipéca ! »4Là-dessus, un autr’ poilu rappliqueEn traînant l’pas, l’air éreinté,Puis, timidement il expliqueQue ses jamb’s ne peuv’nt plus l’porter :« Hum ! Oui ! Je vois !! C’est d’la varice,« Mais… ça provient d’votre estomac !« Il n’y a qu’un’ chos’ qui vous guérisse,C’est l’ipéca ! »5Puis arrive un permissionnaireAtteint d’un léger accident.Qui dit au major débonnaire :« J’crois bien qu’jai chipé l’mal d’Adam. »Notre savant, que rien n’étonne,Lui réplique : « Ça vient de l’estomac !« Et pour celà, toujours j’ordonne« De l’ipéca ! »6Enfin, devant le major en nage,Se présente un fin carotier,— Avec les grimaces d’usage —Pour un’ peti’ blessure au pied ;Ayant bien compris l’ordonnanceFroid’ment, il pose son pied à plat,Et vers’ dessus, par bienséance,Son ipéca.7Par cette drogue magnifiqueChacun est assuré d’guérir,C’est le remèd’ démocratiqueQui ne vous fait mêm’ pas mourir…Mais comm’ je n’ai pas l’crétinismeDes galonnés et des soldatsJ’vomis tous les militarismesSans ipéca !