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Le Nouveau credo du paysan

Mouton, René


Texte de René Mouton (≤1906). Sur l’air : « Le Credo du paysan » de Maurice Doublier.


À mon ami G. Mège.

1
L’azur s’étend, solennel et superbe,
Un astre d’or nous rajeunit le cœur
Et les grillons, perdus dans chaque gerbe
Jettent leurs cris au profane moqueur.
Les dieux sont morts, la nature en liesse,
Convie enfin, quand le brune descend
À son festin d’amour et d’allégresse,
le Roi du jour, le peuple tout Puissant.
 
Je crois en toi, Raison, sublime reine,
Car ton flambeau divin guide la Liberté.
Maîtresse sainte à l’âme souveraine
Je crois en ta splendeur, je crois en ta beauté. (bis)
 
2
Durant des ans, la France féodale
Défit les serfs, à l’ombre des manoirs,
Tel le raisin, pour la dîme royale,
La plèbe était le bon fruit des pressoirs ;
Jacques Bonhomme, à des accords funèbres
Prêtait l’oreille et louait l’Angelus,
La croix brillait, seule, dans les ténèbres,
Lorsque Rousseau clama son : « Fiat lux »
 
Je crois en toi, Raison, sublime reine,
Car ton flambeau divin guide la Liberté.
Maîtresse sainte à l’âme souveraine
Je crois en ta splendeur, je crois en ta beauté. (bis)
 
3
Pourtant la vie est faite d’amertumes
Le grain vermeil pour d’autres s’est formé.
Corbeaux, vautours, gros rapaces sans plumes
Mangent le blé que nous avons semé ;
L’abeille sort parfois de l’alvéole,
les moissonneurs se plaisent ou licou,
Debout les gars, à nous notre auréole ;
Pour Jeanneton, dénudons notre cou.
 
Je crois en toi, Justice qui déchaîne
Le torrent vers le Droit, l’humain vers l’équité,
Fils du labour, nous te voulons prochaine,
Je crois en ta vertu, Fille d’Égalité ! (bis)
 
4
Prêtre, ton Dieu semble aimer le carnage,
Bien que Jésus nous ait dit : Aimez-vous,
Si nos petiots animent leur courage,
Vers les terriers, nous chasserons les loups.
Leur sang est pur, leur rêve est grandiose,
Sur les canons, en dépit de vos forts,
Voyez venir la saine apothéose
De ces bras nus unissant leurs efforts.
 
Nous t’espérons, ô Paix universelle,
La haine disparaît et ta fécondité
Érigera la cité fraternelle
Je crois en ta grandeur, je crois en ta bonté. (bis)

Paru aussi in : l’Almanach illustré de la chanson du peuple pour 1907. — Paris : La Publication sociale, 1906 (page 40).