Nous qu’on exploite et qu’on abaisse
Saurons-nous rompre notre laisse i
1Ohé ! vous tous les mécontents,Sont-ils encore bien loin les tempsOù, fatigué des sottes plaintes,Des gestes non suivis d’effet,Nous saurons mettre à bas, sans craintes,Ce monde égoïste et mut fuit ?Hélas ! si la Révolte gronde,Si l’Émeute éclate parfois,Notre colère est inféconde,Nous faisons le jeu des bourgeois.2Tour à tour on forme entre nous :Clans merveilleux ou projets fousCroyant changer l’ordre des choses,Mais depuis les Jacques lointains,— Résultats dus aux mêmes causes —Nos efforts sont demeurés vains ;On s’invective, ou se chicane,On en vient aux : confis, trop de fois,Vais au-moment d’agir on cane,Comblant les vœux du clan bourgeois.3Pourquoi rêver d’actes hardisQuand le chômage eu nos taudisAccroît l’horreur, met la famine ;Si, trop peu pressés d’en finirAvec l’argent qui prédomine,Nous refusons de nous unir !À quoi bon rallumer les luttesDes vaillants Bagaudes gaulois,Puisque nos haines, nos disputes,Font toujours le lit des bourgeois ?4Vaincus et dupés jusqu’iciVa-t-il toujours en être ainsi ;Resterons-nous l’humble canaille,Le stupide et lâche troupeauQui, pour autrui, peine, travailleEt se voit tondre ras la peau !Dédaignant le seul vrai remède,Voudrons-nous, tels ceux d’autrefois,Périr du mal qui nous excèdeEt raffermir l’État bourgeois ?5C’est assez, c’est trop nous courber,Sous le bât osons regimber :Voilà trente siècles qu’on tremble !Haut les cœurs ! Cessons de gémir,Nous devons tous avec ensembleNous affirmer puis réagir.Amis, il faut enfin qu’on scelleL’accord ébauché tant de fois :Fondons la Cité fraternelleEt brisons les cadres bourgeois !