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Les Grotesques

Privas, Xavier


Texte de Xavier Privas (≤1897).


À Étienne Charles.

Ironiques et joyeux
Coureurs de pantalonnades,
Pour la gaîté de vos yeux,
Pierrot, maitre en pasquinades,
Vient d’ouvrir en plein Paris,
Dans des locaux gigantesques
Où l’on pénètre gratis,
Le Muséum des Grotesques.
 
En ce vaste promenoir
L’ami Pierrot vous convie
À venir, en foule, voir
Tous les bouffons de la vie :
Vieilles belles et vieux beaux
À l’accoutrement burlesque,
Cachant sous leurs oripeaux
Leur vieillissement grotesque.
 
Riches bourgeois parvenus,
Portant fausses particules
Et nimbant leurs fronts cornus
De couronnes ridicules ;
Magots caparaçonnés
De jupes carnavalesques,
Jugeant les emprisonnés
Dans des parades grotesques.
 
Législateurs, faux Catons,
Lycurgues problématiques
Se posant en Phaétons
Du char de la République ;
Vieux retrousseurs de jupons
Aux appétits romanesques,
Cloîtrant leurs désirs fripon
Au sein de lignes grotesques.
 
Artistes de taux talent
Sacrifiant au vulgaire,
Rampant et capitulant
Devant le « Nerf de la guerre » ;
Ratés des lettres, des arts,
Censeurs méchants, pédantesques,
Exhalant en cris de jars
Dépit et bile grotesques.
 
Pour la gaîté de vos yeux,
Coureurs de pantalonnades,
Entrez donc chez le joyeux
Pierrot, maître en pasquinades
On peut pénétrer gratis
Dans ses locaux gigantesques
Où l’on voit le « Tout-Paris »
Vrai Muséum des Grotesques.

Paru chez Ondet (Paris).

Puis, publié dans : Privas, Xavier. — Chansons chimériques. — Paris : Ollendorf, 1897.
Voir aussi la 5e édition (p. 151-155 de le 5e éd.)

Chanson parue aussi dans Le Libertaire, 2e série : hebdomadaire illustré, nº 9 (15-21 octobre 1899).