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Aux exploités

Weill, Lucien


Texte de Lucien Weill (1889).


Peuple ! Entends-tu parler tes maîtres ?
Ils disent que des milliers d’êtres
Vont de nouveau les acclamer ;
Que tu vas oublier ta haine ;
Qu’on va voir la conscience humaine
Au fond des urnes s’abîmer.
 
Ô peuple ! Entends-tu leurs injures ?
Ils prétendent que tes murmures
Ne peuvent pas les effrayer ;
Que tu te plais dans esclavage ;
Qu’ils n’ont pas à craindre l’orage
Menaçant de les balayer.
 
Les politiciens te trahissent.
Tous sont vendus ! Tous ils s’unissent
Contre la Révolution,
Et pour prix de leurs forfaitures,
Ils quémandent des signatures
Au pacte de soumission.
 
Mais pauvre sera leur récolte,
Car le souffle de la révolte
Renversera le dieu Scrutin.
C’est fini : l’autorité crève !
Ici l’émeute et là la grève.
Sus aux Schrader ! Sus aux Watrin !
 
Il va s’écrouler le vieux monde.
Du terrible ouragan qui gronde,
On entend déjà les rumeurs.
Allons ! debout ! les faméliques !
Exploités, préparez, vos piques,
Pour les têtes des affameurs.
 
Plus de maîtres et plus d’esclaves !
À la liberté plus d’entraves !
Avachis, devenez fougueux,
Et faites voir, ô prolétaires !
Qu’il coule encor dans vos artères
Le sang des Jacques et des Gueux.

Jules Watrin, ingénier et sous-directeur de la mine de Decazeville, est défenestré le 26 janvier 1886, lors d’une grève des mineurs contre une baisse des salaires, et en meurt. Un martyr pour les patrons. les termes « watriner » et « watrinade » en découlent.

Schrader : ?


Paru aussi dans L’Attaque : organe hebdomadaire anarchiste (1888-1890), nº 50 (9-26 octobre 1889).