Accueil > Chansons > Le Bûcheron

Le Bûcheron

Herbel, Émile


Texte d’Émile Herbel (≤1888).


1
Dans les forêts blanches de givre
Le bûcheron trime en hiver ;
Frappé par sa hache de fer,
L’arbre roule comme un homme ivre.
Sa chute épouvante parfois
Les cerfs légers au fond des bois
Et les insectes dans les mousses.
 
Pan ! pan ! pan ! cogne bûcheron !
Mais épargne les jeunes pousses ;
Quand les beaux jours nous reviendront
Les jeunes pousses verdiront.
 
2
Aux arbres à la dure écorce
Ô travailleur ! attaque-toi !
Le pin géant, le chêne-roi
Doivent seuls éprouver ta force.
Avec eux combats seul et seul !
Vaincs-les ! qu’ils trouvent un linceul
Au milieu des bruyères rousses !
 
Pan ! pan ! pan ! cogne bûcheron !
Mais épargne les jeunes pousses ;
Quand les beaux jours nous reviendront
Les jeunes pousses verdiront.
 
3
Ce chêne à ramure superbe.
Mais égoïste sans pareil
Qui prend pour lui tout le soleil,
Hardiment couche-le dans l’herbe.
Et les arbrisseaux d’alentour.
Pourront absorber à leur tour
Du soleil les effluves douces.
 
Pan ! pan ! pan ! cogne bûcheron !
Mais épargne les jeunes pousses ;
Quand les beaux jours nous reviendront
Les jeunes pousses verdiront.
 
4
Lorsque ces baliveaux malingres
Seront devenus grands et forts,
Nous ne verrons plus nos efforts
Ne profiter qu’à quelques pingres ;
Nous aurons mâté les bourgeois.
Celui qui coupera le bois
Ne se chauffera plus de brousses.
 
Pan ! pan ! pan ! cogne bûcheron !
Mais épargne les jeunes pousses ;
Quand les beaux jours nous reviendront
Les jeunes pousses verdiront.

Paru aussi in : L’Attaque : organe socialiste révolutionnaire (1888-1890), nº 25 (7-14 décembre 1888).