1Vrai… ’ya des mois qu’on n’a pas d’ veine.Quand j’ dis des mois, j’ sais pas c’ que j’ dis :J’ m’ai toujours connu dans la peine,Sans un pélot, sans un radis…Ça s’rait pas trop tôt que j’ boulotte,J’ vas tomber malade, à la fin,I’ fait chaud et pourtant j’ grelotte !C’est-i’ la fiève ou ben la faim ?2Nom de Dieu ! j’ suis pas à mon aise,C’est épatant… j’ sais pas c’ que j’ai,Avec ça j’ai la gueul’ mauvaise…C’est pourtant pas c’ que j’ai mangé.Si j’aurais mangé d’ la gib’lotteÇa sentirait meilleur : c’est fin,C’est bon, c’est chaud… ah ! c’ que j’ grelotte !C’est-i’ la fiève ou ben la faim ?3Allons bon, v’là mes dents qui claquent !…J’ sais pas c’ que j’ai, c’est épatant :J’entends les os d’ mes jamb’s qui plaquentCont’ les parois d’ mon culbutant.J’ suis foutu si j’ai la tremblotte,J’ suis pus daufier, j’ suis pas dauphin,J’ peux pas m’ soigner… ah ! c’ que j’ grelotte !C’est-i’ la fiève ou ben la faim ?4Et pis j’ sens la sueur qui m’ coule,A fait rigol’ dans l’ creux d’ mon dos ;J’ vas crever, j’ai la chair de poule,C’est fini… tirez les rideaux.Bonsoir la soç’…, mon vieux Alphonse,I’ vaut p’t’êt’ mieux qu’ ça soy’ la fin ;Ici-bas, quoiqu’ j’étais ? un gonce…Là-haut j’ s’rai p’t’êt’ un séraphin.
Accueil > Chansons > Grelotteux
Grelotteux
Bruant, Aristide
Texte d’Aristide Bruant (≤1888).
Chanson parue dans : Bruant, Aristide. — Dans la Rue : chansons et monologues : vol. 1 ; Ill. Steinlen (A. Bruant, 1889, p. 205-207).
Paru aussi in : L’Attaque : organe socialiste révolutionnaire (1888-1890), nº 14 (19-26 septembre 1888).