1J ’avais alors vingt et un ans,À la flreur de mon âge,On me fit aller au régimentPour être à l’esclavage.On commence à nous mener dur,Étant à l’exercice.Car tous ces hommes au cœur impurN’ont qu’la sal’ de police.(refrain)Généraux, commandants,Capitaines, adjudants.Tas d’assassins des peuples,Vous faite de l’argentDu sang des innocentsQue vous rendez aveugles.2Après quelqu’ temps dans le métier,Les Kroumirs se révoltent,Ils veulent les propriétésQue les colons leur volent,Mais les bourgeois très mécontentsDe l’acte libertaire,Traitent ces hommes de brigands,De voleurs sanguinaires.(refrain)3Le bruit commence à retentirDans toutes les casernes,« Qu’il faut appliquer aux Kroumirs,« Un carnage superbe.« Ils sont tous venus pour piller,« Nos chers colons honnêtes,« Il faut pour les civiliser« Faire sauter leur tête. »(refrain)4Des régiments on fit le choix,Pour l’Afrique on s’embarque,Toul mettre à sang voilà la loiDo messieurs les monarques ;Piller, violer les innocents,Voilà la jouissance.Des infâmes buveurs de sang,Qui gouvernent la France.(refrain)5Nous arrivâmes à bon port,Dans la ville de Bône,On dressa la niche à Médor ,Maison qui semble un cône.Mais les officiers muscadins,Que l’argent accompagne.À l’hôtel ils noyent leurs chagrinsDans le vin de Champagne.(refrain)6Quand les tentes furent dressées,Qui fut petit affaire,Fallut se priver de mangerEt coucher sur la terre.Le lendemain, de grand matin,Par les ordre du maitre,Il fallut se mettre en cheminPour vingt-cinq kilomètres.(refrain)7Ça dura comme ça quatre jours,Buvant l’eau goutte à goutte,Nous n’avions qu’un biscuit par jour,Sans viande ni sans soupe.Ce fut après ce long trajet,Éreintés de misèreQue nous fîmes, près de l’étrangerTous couverts de poussière.(refrain)8On mit au rapport journalierCette horrible consigneQue je ne veux pas oublier ,Car elle est trop indigne :« Qui tirerait pendant la nuit,« Sans tuer un rebelle,« Serait attaché sans fusil« Au loin des sentinelles. »(refrain)9Le devoir des soldats françaisÉtait de tout abattre,Piller, violer, tout massacrerChez ces pauvres noirâtres.Nous les civilisions pourtant,Leurs gourbis sont en flammes,Encore ils ne sont pas contentsEt nous tuions leurs femmes.(refrain)10Voilà ce que nous avons faitDu temps de la campagne,Et ce que l’on nous apprenaitDans ces casernes-bagnesAussi, croyez-moi, mes amis,Ne soyez plus fidèles,Et pour servir votre PatrieMontrez-vous tous rebelles.(autre refrain)Ne soyons plus soldatsPour servir ces gens-là,Qui font tuer nos frères ;Mais portons tous bien hautLe sublime drapeauRévolutionnaire.11Savez-vous quel aurait étéNotre devoir , mes frèros,Ce serait d’avoir fusilléTous ces autoritaires.Nous aurions bien moins enduréDe misère en Afrique,Et nous serions débarrassésDe celte immonde clique .(autre refrain)12Débarrassés de tous ces gens,Nous aurions l’avantageD’avoir bien moins d’empêchementPour briser l’esclavage.Donnons donc la mort aux voleursPar les armes et la torche,Car nous aurons le vrai bonheurPar l’emploi do la force.(refrain)Ne soyons plus soldatsPour servir ces gens-là,Qui font tuer nos frères ;Mais portons tous bien hautLe sublime drapeauRévolutionnaire .
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Tribulations et devoirs d’un soldat
anonyme
Texte anonyme signé « un révolutionaire » (≤1883).
Kroumirs : confédération de la Kroumirie à la frontière de la Tunisie et de l’Algérie, pis terme souvent péjoratif.
Paru aussi in : La Lutte : organe anarchiste (1883-1883), supplément au nº 16 (15 juillet 1883).