Soufflez, ô vents d’hiver, tombe toujours, ô neige,On est plus près des morts sous tes linceuls glacés.Que la nuit soit sans fin et que le jour s’abrège :On compte par hivers sur les froids trépassés.J’aime sous les sombres nuées,Ô sapins, vos sombres concerts,Vos branches du vent remuéesComme des harpes dans les airs.Ceux qui sont descendus dans l’ombreVers nous ne reviendront jamais.D’hier ou bien de jours sans nombreIls dorment dans la grande paix.Quand donc, comme on roule un suaireAux morts pour les mettre au tombeau,Sur nous tous verra-t-on notre èreSe replier comme un manteau ?Pareil au grain qui devient gerbe,Sur le sol arrosé de sang,L’avenir grandira superbeSous le rouge soleil levant.Soufflez, ô vents d’hiver, tombe toujours, ô neige,On est plus près des morts sous tes linceuls glacés.Que la nuit soit sans fin et que le jour s’achève :On compte par hivers chez les froids trépassés.
(Centrale d’Auberive, 28 novembre 1872)