Accueil > Chansons > Le Pain maudit

Le Pain maudit

Jolivet, François-Henri


Texte de François-Henri Jolivet (≤1930).


1
Chaque jour, bénissant le pain,
Cadeau de la bonté céleste,
Le prêtre veut que tout humain
Contrit, se courbe sous un geste ;
Même admettant d’un créateur
La plus que scabreuse hypothèse
À cet ordre, un libre penseur
Debout, peut répondre, fort aise ;
 
refrain
De ton idole au cœur flétri
Cesse de chanter des louanges ;
Curé, le pain blanc que tu manges
Ce n’est pas Dieu qui l’a pétri !
 
2
Tel été, comme tous les ans
Où la Nature fut prospère,
Très recueillis, les paysans,
Remerciaient leur divin père ;
Jamais le blé ne fut si beau
Ni si prometteuse, la gerbe,
Lorsqu’en un seul jour, un fléau,
Brûla jusqu’au dernier brin d’herbe !
 
refrain
 
3
Quitter les champs anéantis
Chercher, même en traversant l’onde
D’autres moissons pour ses petits,
C’était narguer le roi du monde ;
L’ouragan vengeant son orgueil :
Brisant les mâts, trouant les voiles,
Rejeta l’homme sur l’écueil
Au rire narquois des étoiles !
 
refrain
 
4
Défiant ton maître et ses flots
En la fureur de leur démence,
Pour porter mille matelots
Se construisit une arche immense ;
Quand l’homme arrachait le charbon
Qui lui fallait pour sa machine,
Le Tout puissant juste et si bon
Lança le grisou dans la mine !
 
refrain
 
5
Lorsqu’invincible, il fut au bout
De son calvaire insurmontable,
L’homme fit du pain malgré tout,
Vois donc, ta part est sur la table !
Dis-nous, vas-tu nier encor,
Par ta faconde désinvolte
Que la source de ce trésor
Soit entière dans la révolte !
 
refrain

http://anarlivres.free.fr/pages/biblio/complements_texte/ChansonsJolivet.html

Publié aussi dans le recueil nº [?] de Nos chansons (1920-1930) de La Muse rouge.