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La Chanson du p’tit truand

Berthier, Pierre-Valentin


Texte : Pierre-Valentin Berthier (1960’s ?).


1
J’suis pas l’lyp’ qui tue ou qui viole,
J’suis l’mégoteur sous-dév’loppé,
J’suis l’gagne-petit d’la cambriole
Qui à chaqu’ fois se fait choper ;
J’ai eu un accident
En redescendant d’un balcon
J’viens d’recevoir un’ ball’ dans l’bide
Tirée par un gros flic très con.
 
J’étais parti pour faire un’ bell’ carrière ;
Malbeureus’ment, honte et désolation
J’vas ravaler mon casier judiciaire
À ma cinquant’-troisième condamnation !
 
2
Les gros cassis, ceuss’ de Pigalle,
I’ s’fout’nt pas mal de mes tracas ;
Ils se rengorg’nt, ils se bègallent,
Ils payent grass’ment leurs avocats ;
Pour moi, y’a pas d’espoir que j’aie
Leurs condés et leurs alibis ;
Les ruad’s de la vache enragée.
Cent pour mézig’, c’est pour bibi !
 
J’ai bien compris que c’est dans un cim’tière
Qu’ils m’enverront fair’ ma relégation
J’vas ravaler mon casier judiciaire
À ma cinquant’-troisième condamnation !
 
3
On n’arrêt’ que la ritifi friture,
On laiss’ filer les gros truands,
Ceuss’ qui ont de puissant’s voitures
Et des pétards tonitruants
Moi, je n’m’attaqu’ qu’aux tout p’tits casses,
Et je n’possèd’ comme arsenal
Que des pinc’s-monseigneur, des passes,
Pour le boulot artisanal.
 
Dans mon grand lit de la Salpatrière.
J’rumin’ ma poisse et ma malédiction ;
J’vas ravaler mon casier judiciaire
À ma cinquant’-troisième condamnation !
 
4
Que m’arriv’-t-il ? C’est d’la magie !
Me voilà guéri a peu prés.
Car, merveilleux, la chirurgie,
Ce qu’elle a pu fair’ de progrès !
Je m’sens maint’nant si peu malade
Que j’ai quasi envie d’chanter
Au fond du panier à salade
Qui me conduit à la Santé !
 
Ma vieil !’ débine a mordu la poussière
Je vais inscrire avec satisfaction
Au palmarès d’mon casier judiciaire
Ma cinquant’-quatrièm’ condamnation !

Paru aussi dans : Berthier, Pierre-Valentin. — La Passion de l’Olympe. — Paris [France] : Éole, 1980 (p. 82-83).