Accueil > Chansons > La Misère

La Misère

Serfant, Victor


Texte de Victor Serfant (1895). Sur l’air : « À Biribi » (1891) d’Aristide Bruant.


Dédié à Jules Moineau

1
Quand on passe dans les grand’s villes
On rêve un peu.
C’est là qu’on voit des imbéciles,
Des malheureux.
C’est là qu’on voit la grand’ misère
Cuvant son vin
Dans le sang des charmantes mères
Qui sont sans pain. (bis)
 
2
Des hommes crèvent d’abstinence
Dans un p’tit coin ;
Mais bien d’autres prenn’nt espérance,
Bien loin, bien loin !
Et d’autr’s, enfin, volent les femmes.
Ces sans-chagrin !
Font des pauvresses, des infâmes,
Qui sont sans pain. (bis)
 
3
Dans d’ignobles trous, des mansaardes,
On voit mourir
Des fillettes qu’la mort regarde,
Sans avenir.
La jeunesse se prostitue.
Ô temps malsain !
Et le pauvre se tu’, se tue !
Il est sans pain. (bis)
 
4
Mais le grand jour des grand’s vengeances
Va vit’ venir,
Les bourgeois crèv’ront sans bombances,
Ils vont gémir ;
Alors nous aurons nos âm’s bonnes,
Ô bon tocsin !
Réveille les franches personnes
Pour les sans pains. (bis)
 
5
Allons, prolétaires du monde,
Réveillez-vous !
Tapez, sans passer un’ seconde,
Pour les voyoux !
Pour ceux qu’on maltraite : canaille,
Brigand, coquin ;
Pour ceux que souvent on mitraille,
Pour les sans pain. (bis)
 
6
L’Aurore arrive, la racaille !
Tranquillement
Toi qui dors sur d’la mauvais’ paille,
Tout doucement,
Tu s’ra un jour forcé d’connaître
Les francs copains,
Qui te diront d’mettr’ par la f’nêtre
Les assassins. (bis)

Bruxelles, le 24 mars 1895.


Paru aussi in : Le Plébéien (1895-1895), 2e année, nº 9 (14 avril 1895).