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Les Juges

Lanoff, Robert


Texte (monologue) de Robert Lanoff (≤1911).


« Un juge quand bien même il serait équitable
Commet d’abord un crime en jugeant son semblable
 »

Juges qui vous tenez assis dans vos prétoires
Juges qui vous parez de longues robes noires
Juges vous qui pouvez à tort ou à raison
Acquitter le coupable ou le mettre en prison
Apprenez que le fait de juger son semblable
Ne peut être d’abord une chose équitable
Avez vous réfléchi vous Messieurs de la Cour
Que vous pourriez peut être aussi faillir un jour
Malgré que l’on soit juge on n’en est pas moins homme
Car vous pouvez fauter tout comme un autre en somme
Et vraiment si le crime était commis par vous
Au maximum aussi vous condamneriez-vous
Comme autre chose Hélas la Justice est un leurre
Sans juges la Justice encore est la meilleure
Car personne en ce monde n’est assez parfait
Pour juger son prochain comme un juge le fait
Vous allez invoquer les lois et le vieux code
Ces deux mots aujourd’hui sont bien passés de mode
Le crime ou le délit n’existant c’est certain
Qu’autant que l’on verra toujours des meurt de faim
Admettez que souvent poussé par la misère
On fait ce que peut être on ne voudrait pas faire
Et si le pauvre diable avait de quoi manger
Il ne volerait pas le pain du boulanger
Il vous faudrait Messieurs faire une différence
Entre les malheureux et ceux qui font bombance
Vous ne pouvez blâmer celui qui vole un pain
Si vous ne savez pas ce que c’est qu’avoir faim
Féliciter celui qui rend une fortune
A mon avis du moins n’a de raison aucune
Car si cet honnête homme avait le ventre creux
Il serait j’en suis sûr beaucoup moins scrupuleux
La probité Messieurs d’un mot je vous désarme
C’est surtout entre nous la crainte des gendarmes
Et si vous étiez vous sûrs de l’impunité *
Vous seriez j’en suis sûr les premiers à voler
Le meilleur d’entre nous ne peut juger les autres
Tel qui se croit parfait n’est qu’un vilain apôtre
Et je prétends que la première inquiétude *
Messieurs les magistrats est d’abord de juger
Qui blâme son prochain ne se voit pas lui-même
Et lorsque d’un arrêt vous rédigez le thème
Juges, greffiers, jurés, procureurs généraux
En pesez-vous toujours les bienfaits et les maux
Le métier de bourreau peut ne pas âtre propre
Mais celui d’assassin est cent fois plus malpropre
Car la peine de mort quand vous la prononcez
Est un assassinat légal prémédité
Ce n’est plus maintenant le temps des anciens âges
Nous ne pouvons agir comme font les sauvages
Et pour différencier le bien d’avec le mal
Il n’est pas pour cela besoin de tribunal
Quand on ne verra plus ni luxe ni misère
Les criminels alors n’auront plus rien à faire
La vie étant un droit incontestablement
Et chacun par ce fait à vivre s’acharnant
Il faut bien cependant avoir quelque logique
Regardons s’il vous plaît le côté juridique
Vous ne pouvez Messieurs croire j’en suis certain
Que ce soit par plaisir qu’on se fasse assassin
Avocats qui parlez au banc de la défense
Sans juges plus besoin de plaider sans conscience
Car le thème aujourd’hui que vous aurez plaidé
Pour un autre demain vous le contredirez
Le maquis embrouillé de votre procédure
N’est à mon humble avis qu’une indigne imposture
Et tous les « attendu » de vos jugements creux
Ne servent qu’a ruiner les pauvres malheureux
Quand l’or ne sera plus qu’une vile matière
Quand se transformera la terre tout entière
Lorsque le communisme viendra remplacer
La misère qui règne en notre Humanité
Quoique dans le passé vous ayez été juges
Nous n’userons jamais de tous vos subterfuges
Oubliant tout le mal que vous avez causé
Nous ne songerons pas alors à vous blâmer
La justice sera pour tout égalitaire
Puisqu’on ne verra plus richesse ni misère !!!
… …
Ceci c’est le bonheur de tout le genre humain
On nous traite de fous mais peut être demain
Nous verrons abolir ce règne de tortures
Et le code et la loi tomber en pourriture.

http://anarlivres.free.fr/pages/biblio/complements_texte/ChansonsLanoff.html :

  • (*) Nous avons essayé autant que faire se peut de remédier à certaines coquilles, sans être sûr de l’exactitude des termes.