À René Chopard
Avant d’aller en combattant,Là-bas, tout au bout de la Chine,Le général KouropatkineFit un plan épatant.Pour pas l’perd’, dans son pardessusIl le mit avec sa sacoche,Et tira du fond de se poche,Son mouchoir, qu’il mit par dessus.Pour rester bien avec Dieu bon,Son doux fiston et la Ste-Vierge,Envoya leur brûler un ciergePar son copain Drumont.Pour arriver à vaincre Oku,Il fit une prière brèveÀ notre patronn’ Ste-Gen’viève,Ell’ lui passa le plan d’Trochu.Il comprit que pour le JaponQu’a des soldats qui font la guerre.Ces deux plans là n’f’raient pas l’affaire,Prit celui d’Mac Mahon.Puis il se dit, ému tremblant :« Je suis muni de mes viatiques,J’ai des icon’ries magnifiques,J’épat’rai I’monde avec mon plan.« Réfléchit que les cuirassésSont quelque fois de gros navires,Ça n’va pas sur terr’, ça chavire,J’vas m’en débarrasser. »Expédia ceux de Port-ArthurAu fond de l’eau, ça se devinePour faire une étud’ sous-marine,Je crois que c’est I’moyen l’plus sûr.Puis il reprit, d’un ton amer :« Pour moi des gros bateaux, c’est toc » ;Envoya ceux d’VladivostockCapturer l’serpent d’mer.Lors, il se dit, ému, tremblant,Devant crésultat qui débute,« Y’a pas d’erreur, il s’exécute,Je n’ai qu’à poursuivre mon plan. »Mais pour jouer des tours au Japon,S’aperçut que 300,00 hommes.Ça fait beaucoup de bruit en somme,Et pas grand chus’ de bon.Il livra des combats sanglants,Poursuivent son plan sur la route,Perdit ses homm’s dans sa déroute,L’monde était épaté d’son plan.Si bien qu’au bout de quelques jours,Il revit tout’ la Mandchourie,La Sibérie et la RussieJusqu’à St-Pètersbourg.N’avait plus qu’un aide de camp,Et disait d’un voix alarmée :« Seigneur, où donc est mon arméeKuroki m’a volé mon plan » ?Vite, il alla voir NicolasQui le r’çut la mine effarée :« J’te croyais toujours en CoréeOu à Yokohama.Tu n’as donc pas suivi ton plan ? »« Ah ! si, dit l’aut’, je l’ai suiviJe l’ai mêm’ suivi jusqu’iciIl consistait à foutr’ le camp. »« Ah ! fit le Tzar, les yeux rageurs,Pour récompenser ton mérite,Je te fais général tout d’suite.D’mes pigeons voyageurs. »Ça prouve à ceux qui font un plan,Qu’il ne suffit pas pour la guerre,D’écrire un rapport militaire.Il ne faut pas rester en plan.Moi, j’dis ça d’après les journaux,Les Russ’s n’ont plus besoin d’marine,Ils ont le plan d’KouropatkineQu’est un immens’ bateau.