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Le Chant des ouvriers

Dupont, Pierre


Ou « Chant des travailleurs ». Texte et musique de Pierre Dupont (1846).


Nous dont la lampe, le matin,
Au clairon du coq se rallume,
Nous tous qu’un salaire incertain
Ramène avant l’aube à l’enclume,
Nous qui des bras, des pieds, des mains,
De tout le corps luttons sans cesse,
Sans abriter nos lendemains
Contre le froid de la vieillesse.
 
(Refain)
Aimons-nous, aimons-nous et quand nous pouvons
Nous unir pour boire à la ronde,
Que le canon se taise ou gronde,
Buvons, buvons, buvons,
À l’indépendance du monde !
 
Nos bras, sans relâche tendus
Aux flots jaloux, au sol avare,
Ravissent leurs trésors perdus,
Ce qui nourrit et ce qui pare
Perles, diamants et métaux,
Fruit du coteau, grain de la plaine…
Pauvres moulons, quels bons manteaux
Il se tisse avec notre laine :
 
refrain
 
Quel fruit tirons-nous des labeurs
Qui courbent nos maigres échines !
Où vont les flots de nos sueurs ?
Nous ne sommes que des machines.
Nos Babels montent jusqu’au ciel,
La terre nous doit ses merveilles
Dès qu’elles ont fini le miel,
Le maitre chasse les abeilles.
 
refrain
 
Au fils chétif d’un étranger
Nos femmes tendent leurs mamelles,
Et lui, plus tard, croit déroger
Eu daignant s’asseoir auprès d’elles ;
De nos jours, le droit du seigneur
Pèse sur nous plus despotique
Nos filles vendent leur honneur
Aux derniers courtauds de boutique.
 
refrain
 
Mal vêtus, logés dans des trous,
Sous les combles, dans les décombres
Nous vivons avec les hiboux
Et les larrons, amis des ombres ;
Cependant notre sang vermeil
Coule impétueux dans nos veines ;
Nous nous plairions au grand soleil
Et sous les rameaux verts des chênes.
 
refrain
 
À chaque fois que par torrents
Notre sang coule sur le monde,
C’est toujours pour quelques tyrans
Que cette rosée est féconde ;
Ménageons-le dorénavant,
L’amour est plus fort que la guerre ;
En attendant qu’un meilleur vent
Souffle du ciel ou de la terre.
 
refrain

Paru aussi dans : Biolley, Georges (éd.) . — Les Chants du peuple. — Genève : Imprimerie jurassienne, 1888. — Fascicule nº 1 (p. 12-13)

Paru aussi dans : La Révolte : organe communiste-anarchiste. — Paris : 1887-1894. — Année 2, suppl. litt. au nº 39 (9 juin 1889)

Paru aussi dans : Chansonnier de la révolution. — Genève : Le Réveil socialiste-anarchiste, 1902 (p. 15).

Paru aussi dans l’Almanach illustré de la chanson du peuple pour 1907. — Paris : La Publication sociale, 1906 (page 59-61).

Publié aussi dans le recueil nº 15 (1927) de Nos chansons (1920-1930) de La Muse rouge.

Paru aussi in : Manfredonia, Gaetano. — Libres ! Toujours… : anthologie de la chanson et de la poésie anarchistes au XIXe siècle. — Lyon : Atelier de création libertaire, 2011 (p. 25).