Charretier brutal et féroceQui tapes sur ta maigre rosse,Au lieu de lui faire du mal,Aime plutôt l’humble animal.Les mêmes tâches sont les vôtres ;Tous deux, sans répit, pour les autres,Vous travaillez dans le brancard :Viande à patron, viande à Macquart.Oui, pour ton cheval, sois plus tendre ;Vous êtes faits pour vous entendre.Lui, la rue est son atelier ;Ta blouse, à toi, c’est ton collier.Du même cuir on vous harnache ;Du fardier où l’on vous attache,Vous haletez dans le brancard :Viande à patron, viande à Macquart.Pendant votre triste existence,Tous deux, vous trimez d’importance.C’est ton compagnon, ton copainEt son avoine vaut ton pain.Tes cheveux, comme sa crinière,Blanchissent en la même ornière.Vous vieillissez dans le brancard :Viande à patron, viande à Macquart.Quand vous succombez à la tâche,Sous les yeux de la foule lâche,Vos corps, de misère crevés,Fraternisent sur les pavés.On vous découpe, ou l’on vous scie :L’équarrissage, ou l’autopsie,Quand vous tombez dans le brancard :Viande à patron, viande à Macquart.
6 mars 1888